Près de 130 morts en six jours: les attaques de jihadistes présumés visant les civils s’intensifient dans l’ouest du Niger proche de la frontière malienne, la dernière ayant frappé dimanche des villages de la région de Tahoua, tuant au moins soixante civils.
L’intensification de ces attaques constitue le plus grand défi auquel va être confronté le nouveau chef de l’Etat Mohamed Bazoum, successeur de Mahamadou Issoufou, dont la victoire à la présidentielle a été confirmée dimanche par la Cour constitutionnelle du Niger.
La dernière des attaques s’est produite dimanche lorsque des hommes armés à moto « ont tiré sur tout ce qui bouge » dans les villages de « Intazayene, Bakorat et Wistane », ainsi que « dans des campements environnants » de la région de Tahoua, a déclaré à l’AFP un élu local.
« Le bilan s’établit provisoirement à 60 morts », a déclaré une source des services de sécurité du Niger.
La région de Tahoua se trouve à l’est de celle de Tillabéri, toutes deux proches de la frontière avec le Mali. Tahoua, vaste région désertique, est, plus au nord, également frontalière de l’Algérie.
La région de Tillabéri est située dans la zone dite « des trois frontières » entre Niger, Mali et Burkina Faso, régulièrement frappée par les groupes jihadistes affiliés à Al-Qaïda ou à l’Etat islamique (EI).
Le 15 mars, des jihadistes présumés y avaient mené plusieurs attaques contre des véhicules qui rentraient du grand marché hebdomadaire de Banibangou. Il avaient également pris pour cible un village, massacrant des habitants et incendiant des véhicules et des greniers à céréales. Bilan: 66 morts.
Le même jour, une attaque revendiquée par l’EI perpétrée contre l’armée malienne dans cette « zone des trois frontières » avait tué 33 soldats.
La région de Tillabéri a été à ce jour la cible des attaques jihadistes les plus sanglantes de ce pays sahélien.
Le 2 janvier, entre les deux tours de l’élection présidentielle, 100 personnes avaient été tuées dans les attaques de deux villages de la commune de Mangaïzé, un des pires massacres de civils au Niger.
Un an auparavant, le 9 janvier 2020, 89 soldats nigériens étaient morts dans l’attaque du camp militaire de Chinégodar. Et un mois plus tôt, le 10 décembre 2019, ce sont 71 soldats nigériens qui avaient péri dans une attaque à Inates, une autre localité de la région de Tillabéri.
– « Mode barbare » –
Ces deux attaques contre l’armée qui avaient traumatisé le pays, avaient été revendiquées par les jihadistes de l’EI.
Si la région de Tahoua est proche de la zone des « trois frontières », elle n’en fait pas partie, mais elle est également régulièrement prise à partie par les jihadistes.
La dernière attaque connue remonte à juin 2020. Au moins trois civils avaient été tués dans un raid contre un site abritant des réfugiés maliens à Intikane.
En octobre 2016, une attaque attribuée à des jihadistes avait fait 22 morts parmi des soldats stationnés dans un camp de réfugiés à Tazalit.
Elu chef de l’Etat le 21 février au second tour de la présidentielle, Mohamed Bazoum s’est engagé à lutter contre l’insécurité, un des plus grands défis du Niger, pays sahélien parmi les plus pauvres du monde également confronté aux jihadistes du groupe nigérian Boko Haram dans sa partie Sud-Est.
« Après le massacre de Banibangou, les terroristes ont sévi hier sur le même mode barbare contre les paisibles populations civiles de Intazayene et Bakorat », a déploré Mohamed Bazoum lundi dans un tweet pour présenter ses « condoléances émues aux parents des victimes ».
Après les massacres du 15 mars, l’armée nigérienne a déployé des renforts dans la région de Tillabéri.
Un contingent de 1.200 soldats de l’armée tchadienne, réputée la plus aguerrie de la région, a également été déployé dans la zone des trois frontières, dans le cadre du « G5 Sahel » regroupant cinq pays – Mauritanie, Mali, Burkina, Niger et Tchad – qui s’efforcent depuis 2017 de coopérer dans la lutte antijihadiste.
Comme ses voisins le Mali et le Burkina Faso, également très touchés par les exactions des groupes jihadistes, le Niger bénéficie aussi du soutien de l’opération française antijihadiste Barkhane, qui compte 5.100 hommes déployés au Sahel.
Avec AFP