À travers ses multiples tournées avec son club brésilien FC Santos en Afrique, l’icône noire du ballon rond, Pelé, a laissé une marque indélébile sur le continent africain. Retour sur le le lien de Pelé avec l’Afrique.

« Il était une source d’inspiration unique pour le continent africain« . C’est l’hommage laissé par le président de la Confédération Africaine de Football (CAF), Patrice Motsepe, à la suite de la mort du roi du football, le Brésilien Pelé, jeudi 29 décembre. Un hommage, à l’image de l’héritage laissé par la star du ballon rond sur le continent. “C’est une perte énorme pour les supporters et les amateurs de football. Je salue également son engagement pour améliorer les conditions de vie des pauvres et des marginaux”, a-t-il ajouté.

L’admiration est telle que de nombreux joueurs africains sont d’ailleurs surnommés Pelé, comme l’international ghanéen Abedi Pelé ou le Congolais François M’Pelé. « Dès qu’un joueur avait du talent, on l’appelait Pelé, explique l’ancien entraîneur de plusieurs clubs africains, Claude Leroy. Il a été le premier joueur noir indiscutablement meilleur au monde. Bien évidemment tous les regards se sont tournés vers lui, explique-t-il. Les tournées du FC Santos en Afrique n’ont fait qu’agrandir sa légende sur le continent.” D’autant plus que le club est venu très tôt sur le continent, à commencer par l’Algérie, en 1965.

Une visite pour les indépendances, en Algérie (1965)

Ce voyage en Algérie intervient quelques années après l’indépendance du pays, après la guerre d’Algérie (1954-1962).Déjà médaillé de deux Coupes du monde en 1958 et 1962, Pelé n’a alors que 25 ans. Il rencontre notamment le président algérien, Ahmed Ben Bella.

Impulsée par la performance de sa nouvelle star, la sélection brésilienne remporte un premier match amical face à l’Algérie (3-0) à Oran le 17 juin 1965. Un second match est prévu au stade municipal de Belcourt, mais il n’a finalement pas lieu : un coup d’État a lieu dans la capitale.

​Une journée chômée pour voir la star Pelé, en République Démocratique du Congo (1967) 

Lors d’un long périple en Afrique subsaharienne, le FC Santos atterrit une première fois en 1976 en RDC. Accueillis à Kinshasa par le Président Joseph-Désiré Mobutu, il joue contre l’équipe nationale du Congo, les Léopards. Score : 2 buts à 1, en faveur des Brésiliens.​

« Ce jour-là, c’était voir Pelé ou mourir, rappelle l’ancien journaliste sportif Albert Tumba. J’avais 16 ans. Nous sommes rentrés à 8 heures du matin pour rentrer un match à 16 heures. Le stade était tellement plein à craquer parce que le président avait décrété une journée chômé. »

Pari manqué pour un buteur, au Sénégal (1967)

Lors de cette même tournée, lors d’un match au stade Demba Diop de Dakar remporté 4-1 par le Brésil, un lob d’une trentaine de mètres inscrit par Pelé traumatise le gardien de but Amady Thiam. “Une fois, lors d’un match au Sénégal, le gardien de but a tellement pleuré après mon but qu’il a dû être remplacé ! Il avait perdu un gros pari !”, s’est exprimé la star sur son Twitter en 2019. Une touche d’humour, qui n’empêche pas Pelé d’imaginer « le Sénégal vainqueur de la prochaine Coupe du monde« , dans une déclaration en 2020.

Deux matchs pour un cessez-le-feu, au Nigeria (1969)

Fin janvier 1969, le club Santos FC arrive au Nigeria, en proie à une guerre civile. La légende veut qu’un cessez-le-feu de 48 heures entre les belligérants ait été obtenu pour permettre la tenue des deux rencontres, contre la sélection nigériane et une équipe locale, Benin City, proche du Biafra. Si les interrogations demeurent, le club de Santos s’impose durant les deux matchs.

À (re)lire : Mort de Pelé : comment la star brésilienne du football a marqué l’histoire du Nigeria

Une rencontre de légende, avec l’international malien Salif Keita (1971) 

Le Santos FC affronte en 1971 le club français de l’Olympique de Marseille, à l’occasion d’un match amical. Pelé affronte une légende du football africain, l’international malien Salif Keita. Vainqueur du tout premier Ballon d’or africain en 1970,  Salif Keita réalise ce 31 mars 1971 à Colombes (en île-de-France) une deuxième partie de match impressionnante face à la star du ballon rond, qui marque à jamais Pelé.

Un retour déguisé en pilote de ligne, au Nigeria (1976)

Sept ans après, Pelé retourne au Nigeria à Lagos. Il évolue désormais dans un autre club, au Cosmos de New York. Il doit y jouer une rencontre amicale et participer à l’inauguration d’écoles de football. Mais la tension sur place est vive. Le 13 février 1976, le général Murtala Mohammed, alors au pouvoir au Nigeria, est assassiné par des hommes armés. Pour s’enfuir, Pelé se réfugie à l’ambassade du Brésil, et patiente trois jours de plus. Les autorités brésiliennes imaginent alors un stratagème pour faciliter sa fuite. Déguisée en pilote de ligne, la star du football parvient à s’envoler de Lagos. Une mésaventure qui ne l’empêchera pas de revenir au Nigeria, une troisième fois.

Un match “accidentellement joué” par Pelé, au Nigéria (1978)

L’équipe brésilienne de Fluminense est à Lagos où elle doit disputer une rencontre dans le cadre d’une tournée. Pelé n’est pas censé jouer. Il est simplement invité à donner le coup d’envoi du match entre la formation brésilienne et un club du pays, les Racca Rovers.

Rapidement, la rumeur se répand: Pelé va jouer. Malgré les démentis, la ferveur et les ventes de billets sont telles que la police finit par convaincre « le Roi » de disputer le match par peur de débordements. Pelé évolue 45 minutes avec le maillot de « Flu ».

Une ferveur à l’image de l’empreinte laissée par Pelé sur le continent. Il lui a pourtant été reproché un temps de ne pas avoir assez pris position contre le racisme du football. “C’était plutôt quelqu’un d’assez lisse, rappelle Claude Leroy. On lui a presque reproché d’avoir surtout mené une carrière économique, même si sur le terrain ça été une personnalité exceptionnelle, d’un altruisme exceptionnel. Pelé, c’était la pureté du jeu. Il avait toutes les qualités techniques, tactiques et mentales. Il n’était pas très grand, mais il sautait plus haut que tout le monde, il allait plus vite que tout le monde. Il a surtout magnifié le numéro 10 : quand j’ai porté mon premier numéro 10, j’avais l’impression d’être Pelé.” 

AFP