Depuis une semaine le Premier Ministre du dernier Gouvernement légitime croupit dans les geôles du CNRD, en compagnie d’autres, eux même en qualité, d’anciens ministres. Cette décision grave, est prise dans le cadre d’une procédure en flagrant délit, initiée par un procureur imbu de sa personne, qui prétend défendre la société de la corruption avec pour arme : la croyance absolue du fait accompli dénuée de preuve, sans le droit.

Cette procédure irrégulière dynamitée par le pool d’avocats étrangers dépêché à cet effet, est le fait d’un homme sûrement instrumentalisé mais jamais indépendant : Ali Toure. Il se découvre dans le cadre de l’instruction. Propulsé au-devant de la scène de l’histoire, dans un pays en quête de repères, en s’imaginant sur un curieux mal entendu : être la justice elle-même. Or de toute évidence, celle-ci est rendue au nom du peuple de Guinée. Dans ce registre, prenant des vessies pour des lanternes, il partage l’estrade du « chevalier blanc » avec son compère Wright, un autre Hurluberlu. C’est l’air du temps. Plus flippant, il a eu ces mots terribles devant les auditeurs de l’émission Mirador, avec la candeur du fou du village, il déclara : « je ne suis pas sorti de la Guinée plus de deux mois depuis que je suis né, je n’ai pas besoin de preuves, j’ai la conviction d’avoir raison. » La messe est dite : Éloge de l’arrogance érigée en valeur cardinale : culte de l’enfermisme, un néologisme pour épingler les dévots qui multiplient les enfermements et les emprisonnements.

Ces mots dis avec l’insouciance du demeuré ont fini par nous convaincre que ce procureur n’était pas à la hauteur de la tâche. Mais son maintien et son instrumentalisation posent dans ce contexte un problème, car ils disent sûrement quelques choses sur l’état de délabrement de notre appareil judiciaire, personnels y compris.

Il faut le savoir, Ali Touré a été biberonné de longues dates au sein d’un système judiciaire, qui au fond, n’a jamais pu faire sa mue idéologique, parce que travaillé par ses prétentions décisionnistes. Cette justice est habituée en effet, au procès stalinien. Ce mauvais penchant retrouve avec la transition et ses atermoiements, le terreau fertile pour exprimer ses méfaits sur ses nouvelles cibles. Cette fois, l’ennemi intérieur est tout connu : un ancien Premier ministre ; son crime : servir son pays.

Il ne s’agit nullement de lutter contre la corruption. Surtout, pas de poursuivre les vrais coupables de cette forfaiture mais de parer les adversaires politiques du système en corrompu. C’est dans cet exercice que le système judiciaire excelle et c’est sur ce terrain que le procureur évolue. Sous nos cieux, cette méthode est encensée et adulée, dès que les enjeux dépassent nos débats nationaux et franchissent les malheureuses frontières, elle déclenche à la fois l’ire et l’hilarité : l’imposture est mise à nue et l’incompétence découverte.
Ce fut le talent de l’ex Premier ministre que d’avoir jeté son dévolu sur ce pool d’avocats étrangers dont l’un des mérites est d’avoir déconstruit le château de cartes procédural d’un procureur mal formé et inexpérimenté, et de mettre un coup d’arrêt à l’amateurisme judiciaire sous le regard de l’opinion publique. Une première victoire engrangée en réalité sur le fait accompli et les errements procéduraux d’un procureur cancre. Ce n’est qu’une première étape.

La prochaine serait de le faire libérer et le placer sous le contrôle de l’opinion publique afin de le protéger des ambitions des apprentis sorciers qui veulent dévoyer la transition et priver le pays du débat fondamental sur son avenir.
Mais, C’est le lieu de saluer la stratégie de défense du pool des avocats. Ce mode de défense dite de rupture adopté, en viendra à démontrer compte tenu de la vacuité des charges retenues contre le Premier ministre, que la seule cohérence de cette procédure se situe dans le projet inique d’éternisassion de la transition. C’est le fond de l’affaire.

Est-ce la première demande de nos compatriotes qui vivent dans l’extrême pauvreté ? Offrir à la plèbe un simulacre d’assises et de procès en jouant sur les affects les plus sincères des populations qui attendent de leurs gouvernants qu’ils fissent preuve de responsabilité. Est-ce la première préoccupation des populations ?

Au lieu de répondre à cette angoisse des populations, la justice est instrumentalisée, les pères de famille traînés dans la boue en guise de boucs émissaires pour attiser le goût du sang de la plèbe.
Ce choix inique ne fait qu’aggraver la fracture entre les justiciers et les justiciables que veut masquer cette morgue de débutant que transpire ce procureur dont les arguments ne sont pas dignes d’un étudiant en propédeutique de droit.

Ce choix signe la volonté politique forte d’abandon du système judiciaire : souffreteux de ses équipements en lambeaux et de son personnel sous qualifié.
C’est le vrai débat Monsieur le Président de la Transition : libérez les prisonniers, réhabilitons la justice en lui accordant les moyens dignes de ce nom pour s’attaquer aux vrais sujets. Ce n’est pas en l’instrumentalisant qu’elle retrouvera le nord qui manque tous les jours un plus à la boussole qu’elle fait profession de devenir. Ah bon entendeur salut…

LES REFORMATEURS