Plusieurs sources diplomatiques le confirment : la bataille pour l’exploitation du Simandou révèle le conflit latent entre la Chine et le bloc occidental au sujet du contrôle du marché mondial du fer, dans un contexte où les aciéries chinoises sont les principales clientes des grands groupes mondiaux.

Dans le secteur du fer, les rapports entre compagnies chinoises et occidentales sont marqués par une concurrence impitoyable visant à offrir des débouchés à leurs productions respectives.

« Dans cette dynamique, la Chine consomme elle-même l’essentiel de sa production, contrairement à ses concurrents qui vendent aux Chinois une bonne partie de leur minerai de fer », fait remarquer à WESTAF MINING un expert, spécialiste du secteur minier.

Selon un rapport de Morgan Stanley (daté de 2019), les compagnies occidentales exportent, souvent à des conditions qu’elles définissent elles-mêmes, un volume de plus de 20 milliards de dollars USD, rien qu’en Chine.

Avec des besoins en acier de plus en plus croissants – principalement pour l’industrie militaire -, le même rapport indique que les usines chinoises pourraient économiser environ 7 milliards USD si l’approvisionnement était garanti à partir du… Simandou.

En d’autres termes, dans les conditions actuelles, un démarrage de la production du gisement de fer découvert entre Kérouané et Beyla, va bouleverser bien des intérêts, ce qui explique la partie d’échecs à laquelle se livrent les compagnies…

« Depuis 1997, le géant mondial Rio Tinto traîne les pieds pour concrétiser ses promesses d’exploitation de sa concession de Simandou sud (blocs 3 et 4). Ses rapports étant ce qu’ils sont avec des géants comme BHP Billiton, Vale ou Fortescue, cette compagnie était très loin de voir l’irruption d’une société comme Winning Consortium Simandou (WCS) dans le secteur », souligne cet expert.

Notre source nous fait remarquer qu’après l’accord transactionnel de 2011, où Rio Tinto avait payé 700 millions USD à l’Etat guinéen, la compagnie avait annoncé son intention de se retirer « définitivement » du projet en 2016 (Simfer SA est la société de droit guinéen qui pilote le projet sur place), en annonçant son intention de vendre ses parts d’actions à Chinalco.

« Après l’échec des discussions, et des démarches infructueuses et dilatoires, Rio Tinto est revenu en 2021 pour inaugurer un nouveau siège, mais sans commencer réellement des travaux d’envergure sur le terrain », affirme-t-elle.

Une source qui a participé à plusieurs réunions avec le géant minier, a dit à WESTAF MINING qu’elle ne percevait pas chez les dirigeants de cette compagnie une réelle volonté de faire avancer leur projet en Guinée.

Entretemps, en novembre 2019, WCS avait remporté l’appel d’offres international pour l’attribution des blocs 1 et 2 (Simandou nord) et ouvert dans la foulée ses chantiers.

Notre expert nous fait remarquer qu’à plusieurs reprises des tentatives de torpillages du processus d’appel d’offres (perdu par le géant australien Fortescue) ont été signalées, avec des fausses informations distillées à son sujet, mais la démarche a pu malgré tout arriver à son terme « dans la transparence », comme confirmé par la lettre de remerciement envoyée par Fortescue au ministre des mines de l’époque (Abdoulaye Magassouba), pour saluer le bon déroulé des opérations d’appel d’offres.

« Dès lors on est en droit de se poser la question de savoir si ce n’est pas le fait d’accélérer les travaux sur le chemin de fer et le port en eau profonde qui explique les écueils brusques enregistrés ces derniers mois, avec des décisions d’arrêt dont les justifications n’ont pas toujours été convaincantes, le 25 mars et le 4 juillet 2022 », s’interroge notre source.

Alors que les choses piétinent en Guinée, et en attendant d’assister au dénouement de cette saga, Rio Tinto a annoncé la mise en service de sa nouvelle mine de fer en Australie, financée à hauteur de 3,1 milliards USD.

Source : Westaf Mining