[auréolé de son image d’opposant historique. Dix ans après, il est accusé d’avoir plongé son pays dans la crise pour rester au pouvoir.
Malgré la contestation et les dizaines de manifestants tués depuis octobre 2019, M. Condé, 82 ans, a confirmé mercredi qu’il serait candidat au scrutin présidentiel prévu le 18 octobre.
“A partir de maintenant, je m’engage parce que vous, vous avez décidé que je m’engage”, a lancé M. Condé, 82 ans, par visioconférence à l’adresse de femmes de son parti qui avaient organisé une manifestation en faveur de sa candidature.
En mars, il a fait adopter par référendum, une nouvelle Constitution. Que l’opposition, qui dénonçait une manoeuvre pour garder le pouvoir, ait boycotté la consultation et que des centaines de milliers de Guinéens, à l’appel du Front national pour la défense de la Constitution (FNDC), se soient dressés contre cette réforme ne l’a pas fait plier.
Comme la précédente, la nouvelle loi fondamentale limite le nombre de mandats à deux. Mais l’adoption de cette nouvelle Constitution permet au président sortant de remettre ses compteurs à zéro, selon ses partisans.
De longues années d’opposition en exil, la prison, une accession quasi miraculeuse au pouvoir et deux mandats présidentiels ont forgé le caractère de cet homme svelte qui boîte légèrement.
Se réclamant de la gauche, c’est un orateur érudit, sachant enthousiasmer son auditoire. Mais il goûte peu la contradiction et ses adversaires le décrivent comme un homme autoritaire et impulsif.
C’est aussi un fervent défenseur de “l’esprit d’indépendance et de souveraineté” de la Guinée, qui avait voté “non” en 1958 au référendum sur l’association avec la France proposée par le général De Gaulle.
– Condamné à mort –
Avec les violences policières qui ont émaillé son deuxième mandat, “il serait difficile d’en dresser un portrait positif. C’est ce qui rend les choses si tristes”, estime Jim Wormington, de Human Rights Watch.
Né le 4 mars 1938 à Boké (ouest), M. Condé est issu de l’ethnie malinké, la deuxième du pays.
Il part en France dès l’âge de 15 ans et y obtient des diplômes en économie, droit et sociologie. Il enseigne ensuite à l’université parisienne de la Sorbonne.
Parallèlement, il dirige dans les années 1960 la Fédération des étudiants d’Afrique noire en France (FEANF) et anime des mouvements d’opposition au régime dictatorial d’Ahmed Sékou Touré, “père de l’indépendance” de la Guinée, qui le fait condamner à mort par contumace en 1970.
Il rentre au pays en 1991, sept ans après la mort de Sékou Touré, auquel a succédé l’officier Lansana Conté. Aux présidentielles de 1993 et 1998, ni libres ni transparentes, Condé est officiellement crédité de 27% et de 18% des voix.
Il inquiète néanmoins Lansana Conté, qui le fait arrêter après la présidentielle de 1998 et condamner en 2000 à cinq ans de prison. Sous la pression internationale, il est gracié en 2001.
Il reste dans l’opposition après l’avènement de la junte du capitaine Moussa Dadis Camara en 2008. Mais en 2010, le “Professeur Alpha Condé” est enfin élu, au second tour, après avoir été très nettement distancé au premier par l’ex-Premier ministre Cellou Dalein Diallo. Cinq ans plus tard, il est réélu au premier tour.
“Il est désormais évident pour les plus sceptiques que M. Alpha Condé, qui revendique des décennies de lutte pour la démocratie en Guinée, n’est autre que la plus grande désillusion de l’histoire politique de notre pays”, a réagi après l’annonce de sa candidature à un troisième mandat le FNDC, collectif de partis, de syndicats et de membres de la société civile, en annonçant de nouvelles manifestations.
Alpha Condé lui se targue de son bilan : réalisation de barrages hydroélectriques, révision des contrats miniers et mise au pas de l’armée, alors que le pays a traversé la pire épidémie d’Ebola de l’Histoire (décembre 2013-2016).
Marié trois fois, M. Condé est père d’un garçon.
Par AFP